La Naissance Des Dieux


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Marc Richir • La naissance des dieux ESSAIS DU XX' SIÈCLE • HACHETTE Marc Richir •• La naissance des dieux ,HACHETTE HL 185 Avant-propos ·R53 11~5 c..1 © Hachette Livre, Département Hachette-Référence, 1995 Le propos de cet ouvrage est de ressatstr en quelque sorte « sur le vif» la transformation" constitutive de la mythologie, que l'institution de l'Etat (du roi) fait subir au matériau mythique préexistant, que l'on peut pour sa part assigner, à la suite des travaux anthropologiques de Claude Lév~-Strauss et de Pierre Clastres, à des « sociétés contre l'Etat .II. Non qu'il existe quelque part (dans l'histoire ou sur le terrain ethnographique) des sociétés où il nous soit donné d'observer cette mutation - nous y sommes toujours « avant» ou « après» -, mais il est possible au moins dans le cas grec, privilégié pour cette raison, de relever le Cours se faisant d'un travail de «mythologijation» qui s'effectue sur un matériau mythico-mythologique préexistant, selon une courbe qui fait sens, et qui .va des « légendes» de fondation des cités grecques à l'élaboration proprement mythologique chez Hésiode. Courbe le plus souvent absente dans d'autres cultures où la fixation écrite de ces «légendes .II, évidemment orales à l'origine, n'a pas eu lieu. Le cas grec est celui d'une multiplicité de -petites cités en conflits mutuels et (( revendiquant .II chacune pour sa part les hautes origines racontées de sa OP fondation, jusqu'à l'époque proprement historique où tr 3 ces récits, avérés comme légendes, ont été repris dans les élaborations d'une culture en rapide transformation, mais remarquablement attentive aussi à la nécessité d'être fidèle aux traditions. La plus importante de ces élaborations est celle de la tragédie. La prise en considération des récits grecs de fondation montre que l'intrigue de la fondation est celle du passage de la barbarie du tyran en son irruption à la civilisation du roi légitime en sa fondation, ainsi que celle, corrélative, et enchevêtrée dans la première, du passage des personnages mythiques originels .au ran~ de divinités ou de héros. Par surcroît, ce qut compltque encore ces récits, la fondation royale, pour être stable, doit s'assurer de la continuité dynastique, ce qu'elle ne peut faire qu'en élaborant du même mouvement des règles sta/d!~,1~ Ic:~r~nté et d; .dévolution. du po~vo~r. Double remamement du matertau symboltque preextstant, constitué inchoativement de mythes encore subsistants et de récits plus anciens de fondation mais tombés en désuétude: par (( divinisation» et « héroïsation » de tel ou tel personnage, et par « généalogisations » enchevêtrées à la fois des dieux et des héros. C'est dire que, pour nous, et à la suite de l'œuvre de Claude Lefort, qui a bien montré l'indissociabilité de l'institution politique et de l'institution sociale (il n'y a pas de société « apolitique »), la fondation mythicomythologique est une fondation théologico-politique, extrêmement complexe, de la royauté. Il n'y a pas, cherchons-nous à montrer, de dieux sans qu'il y ait des rois, et pas de religion, en ce sens encore archaïque, sans qu'il y ait de l'État, du pouvoir coercitif Mais cette fondation est tellement complexe, précisément, que, dans la plupart des cas, elle échoue - échec qui sera repris en pensée et réélaboré à de multiples niveaux dans la tragédie. Cette complexité est due à ce que, 4 ' rmais le cham h symbolique se trouve polarisé en de so, l' . l ' l'" termes de pouvoir, et qu'u~ p~u,votr roya n est. egtttme e s'il s'est fondé en equtltbrant harmomquement . , d' P l qu entre eux tous les pouvotrs /~nses etre. etenus a~ es dieux. La reprise du matertau mythtco-mythol~gtque préexistant signifie donc simultanément s~ m?se e~ ordre au sein d'une unique cohér~nc